Pourquoi ce blog ?

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Ce blog, voulu par l'Antenne Sociale Nord-Pas de Calais (voir profil), se veut un espace d'échanges et de réflexions partagées autour de questions de société, qui se posent dans la région (mais aussi ailleurs). Ces questions seront abordées sous l'angle de la dignité de tout être humain, dans la lignée de la pensée sociale de l'Église.

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lundi 30 août 2010

LES MIGRANTS EN EUROPE

Une nouveauté qui crée un malaise
L’Europe est aujourd’hui la région du monde où arrivent les plus importants flux de migrants. Il y entre chaque année plus de migrants légaux (1,4 million) que dans l’ensemble Etats-Unis + Canada +Australie (850 000). Jadis, l’Europe (sauf la France) était une terre de départ : vers les nouveaux continents, vers la colonisation. Dans les Etats européens, l’immigration d’accueil ne fait donc pas partie de l’identité nationale, alors qu’elle est constitutive de l’histoire des Etats-Unis, de l’Australie, du Canada. Cela explique le malaise des Européens aujourd’hui : ils ont le sentiment que les migrants modifient l’« identité » européenne.

Une réponse à un besoin

Or l’Europe a besoin de migrants. Un rapport de l’ONU, publié en 2001, a suscité un certain émoi. Il établit que si l’Europe, Russie comprise, veut avoir au milieu du siècle le même ratio actifs/inactifs qu’aujourd’hui, il lui faudra accueillir 161 millions d’étrangers, dont 80 dans les pays de l’Europe des 15. Si l’objectif est « seulement » de maintenir la population au niveau actuel, il suffira d’accueillir 100 millions de migrants, dont 47 pour l’Europe des 15.
Cela est moins vrai pour la France, qui a le taux de fécondité le plus haut d’Europe avec l’Irlande. Mais c’est particulièrement vrai pour des pays comme l’Italie (qui devrait accueillir 13 millions de migrants), l’Allemagne (18 millions) et la Russie (28 millions).

Extrait de la conférence de Christian Mellon
le 22 mars 2010

mardi 24 août 2010

France, prends garde de perdre ton âme

C'était en 1941. L'État Français s'abandonnait aux mirages délétères de la collaboration avec l'Occupant qui allaient l'entraîner vers les rivages nauséabonds de la xénophobie et du racisme, quelques Chrétiens lyonnais éclairés par la lucidité du Père Chaillet lançaient, sous ce titre, les Cahiers du Témoignage Chrétien qui devinrent un des piliers de la Résistance spirituelle au totalitarisme hitlérien.

Nous n'en sommes pas là, Dieu merci ! Et il est à juste titre, malvenu d'instrumentaliser la mémoire historique. La République Française n'est pas Vichy et, quoi qu'en dise le Président, notre Nation n'est pas en guerre. Mais, puisque nos dirigeants, pour expliquer les difficultés actuelles du Pays, font amplement référence à la crise de 1929, il n'est pas indécent de faire rappel du climat malsain qu'ont véhiculé les sombres années 1930, prélude au grand cataclysme et à ses horribles débordements. On ne peut impunément proclamer que nous sommes plongés, depuis septembre 2008, dans la pire crise économique que le Monde ait connu depuis 1929, tout en oubliant que celle-ci façonne le terreau sur lequel ont prospéré les idéologies les plus perverses et les politiques les plus barbares que l'Humanité ait jamais endurées.

Et l'Histoire nous enseigne que, dans les périodes troubles de la vie des Nations, grande est la tentation pour les pouvoirs en place, de déchaîner la vindicte populaire contre les boucs émissaires faciles que sont les minorités ethniques ou religieuses ou bien les « ennemis intérieurs ». Des pogroms tsaristes aux nuits de cristal hitlériennes, les exemples fourmillent. Même notre France Républicaine et Démocratique ne fut pas totalement exempte de ce prurit xénophobe, comme le prouvent les émeutes anti-italiennes de la fin du XIXe siècle ou le bannissement des mineurs polonais au début des années 1930.

Ces dérives dramatiques dont les Juifs furent jadis les victimes les plus exposées, n'auraient pas, pu toutefois, se perpétuer sans l'acceptation plus ou moins consentie des populations. Un climat détestable, fait de peurs et de haines aux relents racistes ou xénophobes était entretenu par une cohorte de pécheurs en eau trouble : politiciens, polémistes, pseudo intellectuels en mal de démagogie. Ils étaient le relais des théories fumeuses sur les « races inférieures » ou des errements théologiques justifiant l'antisémitisme. Mais ils tiraient aussi profit de la lâcheté de bien des « éveilleurs de conscience » s'enfermant paresseusement dans le silence. Et notre Église, hélas, ne fut guère exempte de reproches à cet égard.

Voilà pourquoi il est juste de dire que les tracasseries multiples prises aujourd'hui à l'encontre des Roms rappellent de mauvais souvenirs. Et il y a lieu de s'inquiéter de ces discours ambigus mêlant délinquance et migration, insécurité et « gens du voyage », ou insinuant le soupçon quant à la légitimité de la nationalité. Et ces discours deviennent d'autant plus dangereux que les propos de comptoir relevant jusque là du Café du Commerce semblent désormais l'ordinaire des sommets de l'État. Peu à peu la gangrène pervertit sans la moindre retenue, l'opinion publique. Un ministre français annonce-t-il des contrôles fiscaux chez les Roms ? Et voici qu'un député belge (Roland Louis) déclare, tout de go, qu'il est évident que ces populations vivent de vols et de trafics. La boîte de pandore est grande ouverte. On sait comment cela commence, jusqu'où ira-t-on ?

Et après les Roms, quels seront les nouveaux boucs émissaires, tant il est vrai que leur expulsion du territoire national ne réglera en rien les difficultés du Pays ? On entrevoit déjà dans le collimateur, quelques victimes de choix. N'insinue-t-on pas que des familles modestes sont incapables de gérer elles-mêmes l'allocation de rentrée scolaire ? Ne suggère-t-on pas que les chômeurs seraient bien des profiteurs des « niches sociales » ? Et que les jeunes de banlieue ne sont que «racaille » à éliminer de nos cités ?... La vie est dure pour les pauvres sur qui retombe ce mépris, et à qui rien n'est pardonné, comme si pour eux, la délinquance de quelques uns méritait la condamnation sans merci de tous. Et comme si la délinquance financière des beaux quartiers, bien plus coûteuse pour la Nation, était poursuivie avec la même rigueur !

« France, prends garde de perdre ton âme ! ».
A Lyon, où fut lancé, jadis, cet appel à la conscience chrétienne, le Cardinal Barbarin, interrogé par un journaliste, a judicieusement répondu au nom de l'Évangile de Jésus Christ : « Tout ce que vous ferez au plus petit, c'est à moi-même que vous le ferez » Dans notre Église Catholique, des voix de plus en plus nombreuses jusqu'au plus haut de la Hiérarchie comme du plus profond de nos communautés de base, s'élevant pour éveiller les consciences. Puissent-ils être entendus et écoutés.

André BOCQUET, Président du CEAS du Valenciennois

lundi 23 août 2010

LES MIGRANTS DANS LE MONDE

Des chiffres en augmentation mais qui restent faibles
Il faut d’abord s’accorder sur le sens du mot « migrant ». Il désigne une personne « qui est née étrangère dans un autre pays que celui dans lequel elle vit ». A distinguer des « déplacés » qui sont ceux qui ont quitté leur lieu de vie, mais sans franchir une frontière. En 2006, le « stock » de migrants, sur la planète, était estimé à 191 millions, soit 3% de la population mondiale. Ces 191 millions se répartissaient ainsi : Sud/Sud : 61 Sud-Nord 62 Nord-Nord 53 Nord-Sud 14 C’est peu, mais c’est en augmentation. Dans les années 70, c’était seulement 2 % de la population mondiale.

Des raisons multiples à l’origine des migrations
Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation constante de la mobilité :
• La chute des régimes qui enfermaient leurs citoyens
Aujourd’hui, tous les pays, sauf Cuba, la Corée du Nord, la Birmanie et, à un moindre degré, la Chine, laissent leurs ressortissants sortir librement. Les passeports se sont généralisés. Selon Catherine de Wenden, le « droit de sortie » est devenu universel. C’est d’ailleurs conforme à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, qui dit que chacun a le droit de quitter un pays, y compris le sien. Cet article ouvre un « droit à la migration ». Le problème, c’est que le corollaire logique - le droit de s’installer dans un autre pays - n’est pas mentionné. Il y a donc un « droit de sortie », sans « droit d’entrée » correspondant. Si le droit de sortie est de mieux en mieux respecté, le droit d’entrée dans un autre pays reste soumis à la souveraineté des États.
• L’offre abondante de transport
Les moyens de transport se sont développés considérablement. Le tourisme s’est mondialisé. 800 millions de personnes, chaque année, franchissent une frontière, dont la moitié au moins pour des vacances ou du tourisme.
• La violence armée Les conflits armés continuent à jeter sur les routes de l’exil des populations victimes ou menacées. On voit affluer en Europe, ces temps-ci, les Irakiens, les Afghans… Il y a quelques années, ce furent les Tchétchènes.
• Les causes environnementales Bientôt il faudra compter avec les « réfugiés environnementaux ». Selon certains rapports de l’ONU, 50 millions de personnes, dès 2020, pourraient être contraintes de quitter leur pays parce que leur terre sera devenue invivable (trop sèche ou trop inondée).
• Les besoins économiques des pays d’émigration
Les pays de départ peuvent favoriser le départ de leurs ressortissants, car les sommes renvoyées à leurs familles sont importantes. 232 milliards d’euros sont expédiés par les migrants vers leurs pays d’origine. Cette somme est supérieure à celle de l’Aide Publique au Développement. Les Philippines, par exemple, encouragent la migration de leurs ressortissants : 1 Philippin sur 11 vit à l’étranger.
• Le «différentiel de développement »
Le « mal-développement » est souvent souligné comme cause des migrations. On se souvient de la phrase de Michel Rocard sur «la misère du monde ». Mais toutes les études soulignent que ce ne sont pas les plus pauvres qui migrent. Il faut pour migrer avoir quelques ressources, des relations, un minimum d’éducation… Un début de développement dans un pays très pauvre augmente plutôt les possibilités de migrer. Le facteur qui provoque le désir de partir, ce n’est donc pas la misère, mais le « différentiel de développement ». Désormais, grâce aux médias, la plupart des habitants des pays mal développés (ce qui signifie autant : corruption, manque de démocratie, tensions ethniques, absence de débouchés pour les diplômés, que pauvreté) voient comment on vit dans les pays riches. Il faut donc récuser les discours qui présentent le développement comme un « remède » au « mal » que serait la migration. Ce n’est vrai qu’à moyen et long terme.

Des migrants aux profils très divers

Notons de grands changements qualitatifs, qui vont dans le sens d’une forte diversification des migrants. Hier, le migrant type était un homme, peu qualifié, allant offrir sa force de travail, avec le désir de revenir chez lui ensuite. Aujourd’hui, les migrants ont des profils très divers : des demandeurs d’asile, des femmes et enfants plus nombreux ; des élites qualifiées, voire très qualifiées. Les divers types de migrations : - migration d’établissement - migration de travail - migration familiale (regroupement et mariage) - migration pour les études : en 2000, il y avait 2 millions d’étrangers dans les universités des pays développés - réfugiés et demandeurs d’asile : 13,5 millions en 2005 - migrants illégaux (12 millions aux États-Unis)

Extrait de la conférence de Christian Mellon
le 22 mars 2010